POSTUME

 

Un empereur Gaulois ?

260-269 après JC

Qui est Postume ?

 

Son origine reste incertaine, c'est un Gaulois (certains auteurs le disent né à Arras) ou bien un Batave (il serait né à Diessen), il est sous Valérien et Gallien gouverneur d'une province de Gaule (sans doute la Gaule Belgique?), lorsque le limes rhénan fait l'objet d'une double attaque. C'est un personnage important de l'entourage de l'empereur.
         En effet, les Alamans envahissent la Rhétie
         Et les Francs franchissent le Rhin inférieur.

 

L'empereur en titre depuis 253, Gallien, organise la défense, intervenant lui-même en Rhétie et confiant à Postume la contre-attaque sur les Francs.

Gallien confie la protection du Rhin supérieur, secteur intermédiaire plus calme, à son jeune fils Salonin qui reçoit le titre de César, et qui est assisté du général Silvanus.
Postume bat brillamment les Francs, ses troupes enthousiastes sont prêtes à le proclamer empereur. Gallien, devant le danger, par précaution, nomme son fils Auguste.

Postume réagit : il attaque Cologne, ses troupes capturent et exécutent Salonin et Silvanus, sans que sa responsabilité soit démontrée.

Il prend le titre d'empereur dans l'été 260.

 

On peut s'étonner de voir un général porté au pouvoir par ses légions. Ce n'était pas chose rare à cette époque d'anarchie militaire. Gallien, qui tient les rênes de l'empire depuis la capture de son père par le roi Perse Sapor Ier, a dû, à plusieurs reprises, se heurter à des légions ayant élevé leur général au rang d'empereur. L'empire est immense, c'est la raison pour laquelle Valérien, en 253, associa son fils Gallien à l'empire, en faisant en sorte que le Sénat lui donne à lui aussi, le titre d'Auguste (et non celui de César, qui en aurait fait un sous-empereur; là, ils étaient égaux!).

Valérien s'occupe de l'Orient, et laisse Gallien gérer l'Occident.

En 260, Sapor le fait prisonnier, et Gallien doit régner sur tout l'empire, en proie aux attaques diverses, en Germanie, mais aussi dans les Balkans et en Orient.

Il doit faire confiance à ses généraux pour gérer certains problèmes. De son côté, il court de la Gaule, vers l'Italie, les Balkans et l'Orient! Il ne peut être partout, et les légions ont le sentiment d'abandon quand Gallien les quitte pour se rendre dans un autre endroit où sa présence est nécessaire ! alors, ils se révoltent, et nomment empereur leur général, parfois à son corps défendant.

 

C'est ainsi que Postume prend la pourpre.

Que nous disent de lui ses monnaies ?

D’une part, que le pouvoir semble lui avoir réussi, son visage, d’abord frêle, s’est quelque peu empâté, comme ces trois antoniniens nous le montrent clairement. Ils ont été frappés à Trêves en 260 pour le premier, puis en 260-61 pour le second et en 266 pour le dernier.

Il se met sous l'égide d'Hercule. Voici deux monnaies où il se fait représenter à l'avers sous les traits du Dieu en arborant ses attributs : peau du lion de Némée sur l'épaule gauche, massue sur l'épaule droite; au revers de la seconde, la légende est intéressante : HERC DEVSONIENSI.

Hercule est nu debout à droite, la léonté flottant sur l'épaule gauche, s'appuyant sur sa massue de la main droite et tenant un arc de la main gauche.
Traduction : “Herculi Deusoniensi”, (À Hercule de Deusone (?) = Diessen). Ce qui accréditerait sa naissance dans cette ville.

Mais, Postume est-il un empereur Gaulois ?

 

De par sa naissance, sans doute un peu.
Parle-t-il celte ?

Au IIIe siècle, la langue officielle en Gaule, est le latin, sans doute mâtinée de mots celtes (il subsiste encore dans notre langue environ 150 mots d’origine celte : alouette, chariot, brodequin, chêne, ruche, etc).
Que nous disent les monnaies ?
Voyons dans un premier temps les légendes d’avers.
Et, ensuite, quelques légendes de revers.
L’iconographie des revers est empruntée le plus souvent aux monnaies romaines officielles :

           allégories (Moneta, Uberitas, Pax, Felicitas, Providentia…),

           présence des dieux romains (Mars, Hercule, Minerve, Jupiter, Esculape, …).

 

Mais pas de dieux celtes !

Si Postume se voulait empereur Gaulois, nul doute qu'Esus, Épona, ou Teutatès, auraient figurés sur les monnaies.

Que nous disent les légendes ?

Quand un empereur prend le pouvoir, son premier souci est de se faire connaître. Quoi de plus percutant que la monnaie pour véhiculer le portrait de l'empereur, mais aussi ses aspirations profondes qu'il veut faire partager au peuple !

Reprenons une des premières monnaies de l’empereur.

 

Légende d’avers :
                                                    IMP  C POSTVMVS   P F   AVG

                             soit :      imperator                           pivs felix        augustus

                                         (Empereur)                    (Pieux Heureux)   (Auguste)

 

En d'autres termes nous retrouvons la titulature classique qui apparaît sur les monnaies d'empereurs officiels !

Là encore, aucune tentative de se singulariser, et d'affirmer sa "celtitude"!

 

 

Voyons maintenant si nous trouvons d'autres traces, sur les monnaies, d'une quelconque volonté de la part de Postume, de mettre en avant ses ascendances gauloises.

 

Voici quelques légendes qui vont nous éclairer sur ses intentions.

Sur cet antoninien daté de 263-265, le revers est explicite.

L’empereur est représenté debout, sous les traits de Mars, dieu de la guerre, une haste dans la main droite, un trophée sur l’épaule gauche.
Légende :
                          P M / TR P IIII / COS III / PP
Pontifex Maximus / Tribunicia Potestate quartum / Consul tertium / Pater Patriæ

(Grand pontife, revêtu de la quatrième puissance tribunitienne, consul pour la troisième fois, père de la patrie).
Une fois encore, une titulature qu’on pourrait rencontrer sur des monnaies frappées par des empereurs romains officiels !

En voici une autre ou il est Consul pour la 4e fois.
Elle existe avec la même allégorie, mais Consul pour la 5e fois.

Et que dire de cet intéressant double sesterce où l'on voit clairement :                                               S-C
Soit SENATVS CONSVLTO = par autorisation du Sénat !
Il semblerait donc que Postume ait recréé un Sénat à l’imitation du Sénat à Rome.
Le S-C n’apparaît cependant pas sur tous les sesterces ou double sesterces.

Les monnaies frappées par Postume.

Outre de rares aureï (monnaies d'or) Postume fera frapper :

 

Des antoniniens : de masses proches de ceux de Gallien au début du règne ; ensuite ils seront d’un meilleur aloi que les antoniniens de Gallien (un peu plus d'argent).

Des sesterces : Gallien est le dernier empereur à frapper des sesterces … avec Postume.

Des double-sesterces : restauration des monnaies frappées sous Trajan Dèce.

Voici une monnaie qui fait réfléchir. En effet, Trajan Dèce est un empereur romain né en Pannonie Inférieure (Illyrie). Il n'a rien de Gaulois! Et pourtant Postume imite sa monnaie emblématique, créée pour lui, le double-sesterce !

Quand on sait que Trajan Dèce, s'octroie le nom de Trajan réputé fin stratège et grand empereur (C'est sous son règne que l'empire atteindra ses limites les plus étendues), le symbole n'en est que plus évident ! Les références de Postume sont romaines ! Et non pas celtes !

 

En conclusion :

 

En dehors de ses origines, rien ne permet de dire qu’il y a eut chez Postume la volonté de mettre en avant ses ascendances gauloises.
Bien au contraire, il calque son pouvoir sur les instances en vigueur à Rome, comme un souhait de créer en Gaule, une deuxième Rome.
Cette hypothèse s’appuie sur le fait qu’il n’a pas cherché à se faire reconnaître, comme d’autres usurpateurs, par le Sénat romain.

 

Qu'en fut-il de ses successeurs ?

Passons rapidement sur les règnes courts de Lélien et Marius, qui n’ont pas eu le temps de poursuivre, ou bâtir, une politique sérieuse pour diriger l’empire dit « gaulois »

VICTORINUS (10 ou 11 / 269 - 09 / 271)
Marcus Piavonius Victorinus (un nom typiquement romain) est un ancien général de Gallien et un des proches de Postume qui le fait Préfet du Prétoire en 268. Après l'assassinat de Marius, l'armée le porte au pouvoir en 269. Aussitôt l'Espagne fait sécession et rejoint la Rome de Claude II le Gothique. Le fait d'arme de son règne est sans doute le siège d'Autun, rallié à Rome, qui fut pillée en 270, par les Bataves de son armée. Il meurt assassiné en 271.

Il poursuit la politique de Postume sans se recommander de son ascendance gauloise.

Toutes ses monnaies possèdent des légendes et des revers classiques à l'instar des empereurs romains.

Quant à Tetricus (et son fils Tetricus II), c’est un sénateur gouverneur d'Aquitaine en poste à Bordeaux lorsque les soldats du Rhin le proclament après l'assassinat de Victorinus. Il règne de 271 à 274 sur l'Empire des Gaules.
Les conditions de sa reddition face à Aurélien demeurent obscures. Aurélien après l'avoir fait figurer dans son triomphe, le nomme à un poste important en province, son fils aurait, quant à lui, siégé au Sénat.

Il n’aurait eu de cesse de se libérer du joug de la charge qu’on lui a imposée.
La clémence d’Aurélien en fait foi.

Avec lui cesse l'empire "Gaulois".

CONCLUSION

Que parler d’Empire Gaulois est un abus de langage qui s’appuie sur le fait que les empereurs qui se sont succédé depuis Postume avaient des ascendances celtes.


Mais, déjà à cette époque, ce sont des gallo-romains, plus romains que gaulois !

Il serait plus juste de parler de la création en Gaule d'un pouvoir, suite à l'usurpation de Postume, sur la partie de territoire correspondant à l'origine à la Province de la Gaule Belgique.


De plus, les Balkans vont nous donner de grands généraux comme les empereurs nés en Pannonie : Claude II le gothique, Aurélien, Probus … sans qu’on parle d’empire pannonien à leur sujet !

Le CND remercie la municipalité 

pour son soutien